Le Canigou
On peut l'admirer depuis l'appartement, lorsqu'on est assis sur le canapé gris en mousse, et que l'on porte son regard vers la montagne...
C'est le Canigou.
Il me fallut attendre d'être plus âgé, pour pouvoir envisager pareille aventure.
Une carte longuement étudiée, que j'emmenais en promenade, et qui me permettait de nommer rochers,
ravins, sources et cimes que j'apercevais autour de moi.
J'étais avide de nouveaux lieux, de nouveaux chemins, de nouvelles routes, de nouveaux points de vue, et je voulais grimper toujours plus haut.
Ce massif montagneux m'a toujours fasciné et inquiété à la fois.
Je crois qu'il me subjugue par sa majesté, sa lumière, sa luxuriance, son mélange d'essences méditerranéennes et d'air des montagnes.
Il m'effraie parce qu'il est sauvage, abrupt, tortueux, labyrinthique, et que l'homme semble s'y perdre dans une complète impuissance.
Lorsque j'étais plus petit, dans mon lit, il m'arrivait de m'endormir en repensant aux lieux où je m'étais promené avec mon grand-père, je les imaginais plongés dans la nuit, et j'en frissonnais.
Et puis j'aime le repos simple que procure la marche, cet effort régulier qui
nous conduit à nous élever, progressivement, dans une nature aride et colorée à la fois, toujours belle, fidèle à elle même, malgré les années passant.
La randonnée chasse mes pensées. Et si je pense, alors c'est une méditation innocente, paisible comme un murmure.
Quoique 2100 mètres de dénivelé et 40 kilomètres de marche en bermudas et baskets eussent quelque chose d'un peu insensé, je refis l'ascension plusieurs fois au cours des années suivantes, tantôt seul, tantôt accompagné de mon amie Laurence, jusqu'à ce que mes grands-parents ne vendent l'appartement de Vernet-les-Bains.