1980
L'après-midi, nous allons à la plage. C'est le moment de la journée que je préfère. On ne s'y
rend jamais assez tôt à mon goût. Je barbotte dans les flaques d'eau sans voir le temps passer.
Moi aussi j'aime bien le Cotentin, mais j'aime aussi le moment où il faut rentrer à Rouen, car je vais enfin pouvoir retrouver tous mes jouets, que j'avais dû temporairement abandonner.
De la salade ?
Encore de la salade ?
Ma sœur et moi terminons la journée en dévalant la pente du jardin allongés sur les tabourets de la cuisine, amusante acrobatie qui ne provoque aucune vitupération chez notre mère, chose encore plus exceptionnelle.
J'y perds mes deux premières dents de lait. Ça faisait déjà un petit bout de temps que je les triturais dans tous les sens...
Bon, cette histoire de petite souris, je vous avoue y croire dans un premier temps. Pourquoi douter ? Il faut dire que c'est bien gentil
de sa part de me laisser
une pièce de cinq francs sous l'oreiller... Mais, comme pour le père Noël, comme pour les cloches de Pâques, elle ne va pas durer longtemps
cette légende.
Cette manie des adultes de raconter n'importe quoi aux enfants sous prétexte que ce sont des enfants ! En tant qu'enfant, je peux vous
dire que c'est agaçant, à la longue.
Aux élèves qui ont bien fait leur travail, elle distribue des bons points, que nous accumulons dans des petites boîtes.
Le samedi, nous pouvons échanger dix
bons points contre une image, et les images contre des images plus grandes encore.
A la récréation du matin, à dix heures, tout le monde va chercher sa petite brique de lait.
Et le lundi, en quittant la maison, il ne faut pas oublier de prendre avec soi les quatre tickets de cantine de la semaine.
Tout cela est bien sérieux. C'en est fini de la maternelle et de ses gomettes multicolores.