1980

A Pâques, mes parents louent un gîte rural à Saint-Germain-des-Vaux, un petit hameau agricole du Cotentin, face au cap de la Hague. L'endroit est fouetté par le vent marin et les odeurs de bouse de vache.

Le matin, nous faisons une promenade sur les sentiers côtiers.
L'après-midi, nous allons à la plage. C'est le moment de la journée que je préfère. On ne s'y rend jamais assez tôt à mon goût. Je barbotte dans les flaques d'eau sans voir le temps passer.

Je crois que c'est cette année que mes parents tombent définitivement amoureux de cette région.

Moi aussi j'aime bien le Cotentin, mais j'aime aussi le moment où il faut rentrer à Rouen, car je vais enfin pouvoir retrouver tous mes jouets, que j'avais dû temporairement abandonner.

Quoi ?
De la salade ?
Encore de la salade ?
Un dimanche du mois de mai, on invite mes grands-parents à déjeuner. On s'installe dans le jardin pour manger, ce qui n'est pas très fréquent.

Ma sœur et moi terminons la journée en dévalant la pente du jardin allongés sur les tabourets de la cuisine, amusante acrobatie qui ne provoque aucune vitupération chez notre mère, chose encore plus exceptionnelle.

Fin juin, nous descendons à Vernet-les-Bains, comme d'habitude.

J'y perds mes deux premières dents de lait. Ça faisait déjà un petit bout de temps que je les triturais dans tous les sens...
Bon, cette histoire de petite souris, je vous avoue y croire dans un premier temps. Pourquoi douter ? Il faut dire que c'est bien gentil de sa part de me laisser une pièce de cinq francs sous l'oreiller... Mais, comme pour le père Noël, comme pour les cloches de Pâques, elle ne va pas durer longtemps cette légende.
Cette manie des adultes de raconter n'importe quoi aux enfants sous prétexte que ce sont des enfants ! En tant qu'enfant, je peux vous dire que c'est agaçant, à la longue.

Classe de CP, 1980-1981, Ecole Berthelot
Ma classe de CP
En septembre, on m'inscrit au CP, dans la classe de Mme Fourtine. Cette institutrice patiente et menue nous enseigne l'alphabet phonétique à raison d'un son ou deux par semaine. A comme Arbre, D comme Dé, I comme Ile, P comme Pipe, S comme Sac, CH comme Chat, OI comme Poire, ON comme Pont... Chaque nouvelle lettre, chaque nouvelle syllabe est punaisée au dessus du tableau noir, avec une image pour l'illustrer.
Aux élèves qui ont bien fait leur travail, elle distribue des bons points, que nous accumulons dans des petites boîtes. Le samedi, nous pouvons échanger dix bons points contre une image, et les images contre des images plus grandes encore.
En classe, nous lisons Le château de Pompon, un livre qui raconte les aventures d'un âne et de ses amis.
A la récréation du matin, à dix heures, tout le monde va chercher sa petite brique de lait.
Et le lundi, en quittant la maison, il ne faut pas oublier de prendre avec soi les quatre tickets de cantine de la semaine.
Tout cela est bien sérieux. C'en est fini de la maternelle et de ses gomettes multicolores.